Par Jean-Baptiste Mesona
Pour saintrambertdalbon.com – À la découverte de notre patrimoine
Décembre 2025
En Résumé
Jules Védrines (1881-1919), surnommé « Julot », fut l’un des plus grands aviateurs français de l’histoire. Ouvrier aux origines modestes devenu recordman mondial, il incarne l’esprit des pionniers de l’aviation : audacieux, franc-parler, patriote. Vainqueur de la course Paris-Madrid (1911), détenteur du record de vitesse mondiale (169,7 km/h en 1912), il réalise l’exploit légendaire d’atterrir sur le toit des Galeries Lafayette (janvier 1919). Trois mois plus tard, le 21 avril 1919, alors qu’il tente le premier vol postal Paris-Rome à bord d’un Caudron C.23 baptisé « La Cloche », une panne moteur le force à un atterrissage d’urgence à Saint-Rambert-d’Albon. L’accident est fatal pour lui et son mécanicien Marcel Guillain. Aujourd’hui, une stèle commémorative devant la mairie et une rue portant son nom perpétuent sa mémoire, faisant de Saint-Rambert-d’Albon un lieu de pèlerinage pour les passionnés d’aviation et d’histoire.

Le 21 Avril 1919, Quand Saint-Rambert-d’Albon Entre Dans l’Histoire de l’Aviation
Imaginez la scène : C’est un lundi matin du printemps 1919. Les habitants de Saint-Rambert-d’Albon vaquent à leurs occupations quotidiennes. La Première Guerre mondiale vient de s’achever quelques mois plus tôt, et la France respire enfin. Soudain, vers 10h30, un bruit de moteur inhabituel attire les regards vers le ciel. Un avion bimoteur, un Caudron C.23, survole le territoire communal en difficulté évidente. L’appareil perd de l’altitude, tente désespérément de se poser en urgence près du lieu-dit « La Fouillouse », à proximité du village de Coinaud.
Le crash est brutal. L’avion s’écrase au sol, tuant instantanément ses deux occupants : le célèbre aviateur Jules Védrines, 37 ans, et son fidèle mécanicien Marcel Guillain. La nouvelle se propage comme une traînée de poudre : la France vient de perdre l’un de ses plus grands héros de l’aviation, et Saint-Rambert-d’Albon entre à jamais dans l’histoire aéronautique nationale.
Mais qui était vraiment cet homme surnommé « Julot » ? Pourquoi son nom résonne-t-il encore aujourd’hui dans notre commune ? Et comment un simple vol postal est-il devenu l’un des drames les plus célèbres de l’aviation française ? Partons à la découverte de Jules Védrines, ce « titi » parisien au franc-parler légendaire, devenu recordman mondial et héros de guerre.
I. Jules Védrines : Portrait d’un Pionnier Atypique
1. Des Origines Ouvrières à la Passion de l’Aviation (1881-1910)
Naissance et enfance modeste
Charles Toussaint Védrines, dit « Jules », naît le 29 décembre 1881 (certaines sources indiquent le 21 décembre) à Saint-Denis, dans une famille ouvrière de la banlieue parisienne. Son père, d’origine auvergnate, travaille comme couvreur. Le jeune Jules grandit dans un environnement populaire, loin des salons bourgeois de l’époque. Élève médiocre, il se détourne rapidement des études classiques pour se tourner vers ce qui le passionne vraiment : la mécanique.
Un parcours autodidacte remarquable
Dès l’adolescence, Jules Védrines enchaîne les petits métiers : ouvrier couvreur comme son père, puis plombier-zingueur. Mais son ambition le pousse à suivre des cours du soir à l’Institut Catholique des Arts et Métiers de Lille (ICAM), où il se forme sérieusement à la mécanique industrielle. Cette formation théorique, combinée à son expérience pratique sur le terrain, fait de lui un mécanicien de premier ordre.
La rencontre décisive avec l’aviation
En 1905, Jules Védrines entre aux usines Gnome à Gennevilliers, une entreprise spécialisée dans la fabrication de moteurs rotatifs pour automobiles et bateaux. À partir de 1908, Gnome commence à développer des moteurs d’avion, et Védrines, fasciné par cette nouvelle technologie, se spécialise dans leur mise au point. Il gravit rapidement les échelons : simple ouvrier en 1905, il devient mécanicien d’essais en 1909, le poste le plus élevé accessible aux ouvriers de l’entreprise.
C’est à cette époque qu’il découvre les exploits des pionniers de l’air : Blériot traversant la Manche (1909), Farman établissant des records de distance… Védrines n’a alors plus qu’un seul désir : voler lui-même.
La rencontre avec Robert Loraine
En 1909, Jules Védrines est affecté comme mécanicien personnel de Robert Loraine, un pilote-acteur britannique excentrique venu apprendre à voler à l’école Farman du camp de Châlons. Cette expérience transforme sa vie : au contact quotidien des avions, il apprend les subtilités du pilotage et développe une compréhension intuitive de la mécanique du vol.
Le brevet de pilote
Le 7 décembre 1910, à Pau (Pyrénées-Atlantiques), Jules Védrines obtient enfin son brevet de pilote n°312 de l’Aéro-Club de France. À 29 ans, il peut enfin réaliser son rêve : devenir aviateur professionnel. Il quitte les usines Gnome pour se lancer dans la carrière périlleuse mais enivrante de pilote de course et de démonstration.
2. L’Année de Gloire : 1911, l’Ascension Fulgurante
1911 est l’année qui propulse Jules Védrines au sommet de la célébrité. Embauché par le constructeur Morane (qui deviendra bientôt Morane-Saulnier), il enchaîne les exploits avec un monoplan Morane-Borel équipé d’un moteur rotatif Gnome de 70 chevaux.
Mars-avril : Les premiers succès
- 23 mars 1911 : Védrines survole Paris en pleine journée et, à basse altitude, jette une pluie de fleurs sur le cortège de la mi-Carême. Le coup de pub est magistral et fait de lui une célébrité parisienne.
- 31 mars 1911 : Il réalise le premier vol aller-retour Paris-Poitiers sans escale. À son arrivée, avec son franc-parler habituel, il avoue avoir « un peu triché » en suivant la ligne de chemin de fer pour ne pas se perdre !
- 24 avril 1911 : Il remporte la course aérienne Paris-Pau, consolidant sa réputation de pilote fiable et rapide.
26 mai 1911 : La Course Paris-Madrid, l’Exploit Historique
C’est le jour qui change tout. Le journal Le Petit Parisien organise la première course de capitale à capitale : Paris-Madrid, soit 1 197 kilomètres à vol d’oiseau découpés en trois étapes (Issy-les-Moulineaux → Angoulême → Saint-Sébastien → Madrid). La dotation totale est colossale pour l’époque : 200 000 francs, dont 100 000 francs au vainqueur.
Le 21 mai 1911, jour du départ, 200 000 spectateurs se massent sur l’aérodrome d’Issy-les-Moulineaux. L’ambiance est électrique. Parmi les 28 concurrents inscrits (20 civils, 8 militaires), on trouve les plus grands noms de l’aviation : Roland Garros (futur héros), Eugène Gilbert, Weymann, Beaumont…
Le drame frappe dès le départ : l’avion du concurrent Émile Train s’écrase dans la foule, tuant Maurice Berteaux, ministre de la Guerre, venu assister au décollage. Malgré ce drame, la course continue.
Les abandons s’enchaînent : pannes mécaniques, accidents, conditions météorologiques difficiles… Au fil des étapes, les concurrents chutent les uns après les autres. Roland Garros abandonne à mi-parcours, Beaumont également.
Le 26 mai 1911, Jules Védrines se pose seul sur l’aérodrome de Getafe, près de Madrid, devant 250 000 spectateurs et le roi Alfonso XIII d’Espagne en personne. Il est le seul à avoir terminé la course.
Selon la légende, lorsque la foule enthousiaste se précipite autour de son monoplan pour l’acclamer, Védrines aurait lancé avec son accent de titi parisien : « Bande de cons, foutez-moi le camp que je descende ! Je suis un homme comme un autre ! » Du pur Védrines dans le texte : franc, direct, sans fioritures.
Le succès est total : Il empoche 100 000 francs (soit environ 400 000 € actuels), la moitié de la dotation totale. Du jour au lendemain, Jules Védrines devient riche et célèbre. Pour un ancien ouvrier couvreur, c’est une ascension sociale vertigineuse.
La vie de famille
Jules Védrines épouse Amélie Mélanie Noémie Lejeune, née à Paris mais d’origine creusoise, dont la famille réside au hameau du « Mont », commune de Bussière-Dunoise (Creuse). De cette union naissent quatre enfants : Jeanne, Henri, Suzanne et Émile.
En avril 1911, alors qu’il participe au rallye aérien Paris-Pau, Védrines fait un détour pour voir sa belle-famille. Il atterrit à Bussière-Dunoise dans un pré, en partie à cause du brouillard, en partie pour embrasser sa femme et ses enfants. La surprise de la famille est totale ! Aujourd’hui, une stèle commémorative se dresse à l’endroit exact de cet atterrissage, représentant une aile de Morane avec le visage stylisé de Védrines en son centre.
3. 1912 : Recordman Mondial et Homme Politique Malheureux
Les records de vitesse en série
En 1912, Jules Védrines passe chez le constructeur Deperdussin, réputé pour ses monoplans rapides conçus par l’ingénieur Louis Béchereau, inventeur du fuselage monocoque révolutionnaire.
Védrines établit alors une série de records du monde de vitesse :
- 13 janvier 1912 : 145,161 km/h sur Deperdussin
- 2 mars 1912 : 167,910 km/h
- 13 juillet 1912 : 170,777 km/h
9 septembre 1912 : La Coupe Gordon-Bennett à Chicago
Le 9 septembre 1912, Jules Védrines participe à la Coupe Gordon-Bennett, la compétition aéronautique la plus prestigieuse au monde, organisée cette année-là à Chicago (États-Unis). L’équipe de France est composée de trois pilotes : Jules Védrines, Maurice Prévost, et Frey.
Le défi : Parcourir 200 kilomètres le plus rapidement possible.
Le résultat : Védrines remporte la course en 1 heure 10 minutes et 56 secondes, soit une vitesse moyenne de 169,7 km/h (certaines sources indiquent 174,1 km/h selon le mode de calcul). Il pilote un monoplan Deperdussin monocoque équipé d’un moteur Gnome de 140 chevaux et d’une hélice Chauvière.
C’est historique : C’est la première victoire française dans cette compétition, jusque-là remportée par des Américains, des Anglais et des Sud-Américains. Cerise sur le gâteau : son compatriote Maurice Prévost termine deuxième. Double podium tricolore !
Un accident grave
Le 29 avril 1912, alors qu’il tente de relier Douai à Madrid pour s’emparer de la Coupe Pommery, son moteur tombe en panne. Védrines s’écrase rue de l’Yser à Épinay-sur-Seine, à proximité de la voie ferrée. Il est grièvement blessé mais survit miraculeusement. Quelques mois plus tard, encore convalescent, il tient son propre rôle dans un film réalisé aux studios Éclair : Le Roman de Védrines.
L’aventure politique
Poussé par ses amis, dont le journaliste sportif Jacques Mortane, Jules Védrines se lance dans une aventure politique inattendue : il se présente aux élections législatives de 1912 dans l’Aude, sous l’étiquette « Donner des avions à la France », une campagne pour promouvoir le développement de l’aéronautique militaire.
Sa méthode de campagne est révolutionnaire : il se déplace de commune en commune en avion, atterrissant dans les champs pour rencontrer directement les électeurs. Le spectacle fait sensation ! Ses partisans chantent une chanson occitane créée pour l’occasion, La cançon de Vedrina, sur l’air de La Valse brune, qui reste populaire aujourd’hui dans la région.
Le résultat : Védrines s’incline de quelques centaines de voix seulement face à Jean Bonnail, le représentant du candidat sortant. Ses partisans crient au « vol électoral » et de véritables émeutes éclatent, nécessitant l’intervention d’un contingent militaire pendant plusieurs jours. Védrines se représente en mai 1914 mais échoue à nouveau.
Malgré ces échecs électoraux, il est adopté par la population locale de Limoux (Aude), où il installe sa famille de 1913 à 1918.
1913 : Le raid France-Égypte
Du 20 novembre au 29 décembre 1913, Jules Védrines réalise un exploit majeur : la première liaison aérienne France-Égypte avec escales à bord d’un monoplan Blériot. Il part de Nancy (et non de Paris) et trace une route audacieuse :
Nancy → Prague → Vienne → Belgrade → Constantinople (Istanbul) → Beyrouth → Jaffa → Le Caire
À Beyrouth, il devient le premier pilote à se poser au Liban. Au Caire, il réalise l’un des premiers clichés aériens de la Grande Pyramide de Gizeh, un document historique exceptionnel.
Un drame familial
Le 1er avril 1914, son frère Émile Védrines, lui aussi pilote, se tue en avion à Reims. Ce drame personnel marque profondément Jules, mais il n’a guère le temps de faire son deuil : quelques mois plus tard, la Première Guerre mondiale éclate.
4. 1914-1918 : L’As Incompris de la Grande Guerre
Mobilisation et malentendus
En août 1914, à l’âge de 32 ans, Jules Védrines est mobilisé dans l’aviation militaire. Son parcours de guerre sera paradoxal : héros pour le public, problème pour ses supérieurs.
Le problème : Védrines conserve son franc-parler de titi parisien et son tempérament rebelle. Il tutoie son colonel (issu de la vieille aristocratie militaire), critique ouvertement les décisions absurdes, et refuse l’hypocrisie des rapports hiérarchiques. Pour l’état-major, cet aviateur indiscipliné mais compétent est une épine dans le pied.
L’instructeur de Georges Guynemer
Affecté à l’escadrille n°3 des Cigognes (future MS 3, commandée par le capitaine Brocard), Védrines devient l’instructeur d’un jeune pilote débutant maladroit nommé Georges Guynemer.
Au début, Guynemer « casse du bois » (expression de l’époque pour désigner les accidents d’avion à répétition) et est menacé de renvoi. Mais Védrines, reconnaissant chez ce jeune homme un potentiel extraordinaire, le prend sous son aile et l’aide à progresser. Quelques mois plus tard, Guynemer devient l’un des plus grands as français de la guerre, avec 53 victoires aériennes homologuées avant sa disparition en septembre 1917.
Les « missions spéciales » : Espionnage aérien
À partir de 1916, le général Pierre Roques, créateur de l’Aéronautique Militaire Française, confie à Védrines des « missions spéciales » particulièrement dangereuses : déposer et récupérer des espions français et britanniques derrière les lignes ennemies.
Le principe : Védrines pilote un biplan Caudron G.4 bimoteur désarmé (sans mitrailleuses pour gagner du poids et de la vitesse). Il survole les lignes allemandes de nuit ou par mauvais temps, atterrit dans des champs occupés, dépose ses passagers clandestins, puis repart avant d’être repéré. Parfois, il revient chercher les mêmes espions quelques jours ou semaines plus tard.
Ces missions, parmi les plus périlleuses de la guerre, sont tenues strictement secrètes pour des raisons évidentes de sécurité. Si Védrines ou ses passagers sont capturés, c’est l’exécution immédiate. Il réalise au moins une dizaine de ces missions entre 1916 et 1918.
L’anecdote Mata Hari
La célèbre espionne Mata Hari (Margaretha Zelle), condamnée à mort en 1917 pour intelligence avec l’ennemi, affirme lors de son procès qu’« un aviateur français qui survolait les lignes ennemies était guetté », laissant entendre que Védrines transportait des espions allemands en Allemagne.
Cette accusation est formellement démentie par les services de renseignement français. Mata Hari, connue pour son penchant à l’affabulation, a probablement été victime d’une manipulation des services secrets. Elle est fusillée le 15 octobre 1917.
La tentative d’évasion de Roland Garros
En 1917, Jules Védrines propose à l’état-major une mission audacieuse : utiliser son expérience de dépose d’agents pour aller faire évader son ami Roland Garros, prisonnier des Allemands depuis février 1915. Védrines estime qu’il peut atterrir en territoire occupé, récupérer Garros, et repartir avant que les Allemands ne réagissent.
L’état-major refuse catégoriquement, jugeant la mission trop risquée. Garros parviendra finalement à s’évader par ses propres moyens en février 1918, avant d’être abattu en octobre 1918, quelques semaines avant l’Armistice.
Un palmarès militaire controversé
Jules Védrines revendique 7 victoires aériennes, mais seulement 3 sont homologuées officiellement. Cette discordance s’explique par plusieurs facteurs :
- Ses missions spéciales étaient classées secret-défense, donc non comptabilisées
- Son caractère difficile lui valait peu de soutien de ses supérieurs pour valider ses victoires
- La bureaucratie militaire favorisait les pilotes « bien notés »
Malgré cela, il est cité trois fois à l’ordre de l’Armée et nommé officier (sous-lieutenant) le 26 juin 1918. Il reçoit également une quatrième palme pour sa croix de guerre à titre posthume en reconnaissance de ses missions spéciales.
Un accident tragique qui aurait pu être évité
En septembre 1916, Védrines signale à ses supérieurs qu’un de leurs avions présente un défaut de conception dangereux. Malheureusement, le rapport est ignoré. Le 16 septembre 1916, le jeune pilote André-Ernest Simon (21 ans), qui n’avait pas été informé du problème (secret militaire oblige), monte dans cet avion et se tue lors d’un vol d’essai. Védrines est profondément affecté par ce drame qu’il estime être dû à l’incompétence bureaucratique.
1916-1918 : Instructeur malgré lui
En 1916, excédé par son indiscipline, l’état-major décide de l’éloigner du front. Védrines est transféré comme instructeur, officiellement « pour des raisons procédurières » mais en réalité pour s’en débarrasser. Ironiquement, c’est dans ce rôle qu’il rendra l’un de ses plus grands services à la France en formant de futurs as, dont Georges Guynemer.
5. 1919 : L’Année de Tous les Exploits et de la Tragédie
19 janvier 1919 : L’exploit des Galeries Lafayette
La guerre est terminée depuis deux mois. Jules Védrines, qui n’a jamais su rester inactif, cherche déjà son prochain défi. Il le trouve sous la forme d’un pari lancé par les Galeries Lafayette : le grand magasin parisien offre 25 000 francs (environ 40 000 € actuels) à quiconque parviendra à atterrir ET redécoller du toit de leur immeuble du boulevard Haussmann.
Le toit en question : Une terrasse de 28 mètres sur 12, à plusieurs dizaines de mètres de hauteur, en plein cœur de Paris. Plusieurs pilotes d’exception, dont Roland Garros et Marc Pourpe, ont renoncé avant la guerre, jugeant l’exploit impossible.
Le 19 janvier 1919, malgré l’interdiction formelle de la préfecture de Paris, Jules Védrines décolle aux commandes d’un Caudron G III. Sous les yeux médusés de milliers de Parisiens massés dans les rues, il réussit à se poser sur le toit.
Le problème : À l’atterrissage, il casse son train d’atterrissage. Impossible de redécoller dans ces conditions. Védrines empoche quand même les 25 000 francs (la moitié de la prime, puisqu’il n’a pas redécollé), mais se voit infliger une amende de 16 francs par la police pour atterrissage illégal !
L’événement est largement médiatisé et consacre définitivement Védrines comme l’aviateur le plus audacieux et le plus populaire de France. Une stèle commémorative est érigée sur place (elle existe toujours).

Mars-avril 1919 : Le projet Paris-Rome
Quelques semaines après son exploit parisien, Védrines se voit confier une mission historique : inaugurer la première ligne postale aérienne Paris-Rome. L’objectif est de prouver que l’aviation peut assurer un service postal régulier et fiable entre les capitales européennes.
L’appareil : Un Caudron C.23 bimoteur de bombardement reconverti, baptisé « La Cloche », chargé de 1 600 litres d’essence pour le trajet. L’avion doit parcourir environ 1 200 kilomètres, en survolant le massif du Mont-Blanc, et revenir dans la journée.
L’équipage : Jules Védrines (pilote) et Marcel Guillain (mécanicien), fidèle compagnon de nombreux vols.
Le décollage : Le lundi 21 avril 1919, à 6h30 du matin, le Caudron C.23 décolle de l’aérodrome de Villacoublay (Yvelines). Les conditions météorologiques sont acceptables, et l’avion file vers le sud.
II. 21 Avril 1919 : Le Drame de Saint-Rambert-d’Albon
1. Le Vol Fatal : Chronologie du Dernier Voyage
6h30 : Décollage de Villacoublay. Védrines et Guillain sont confiants. Le Caudron C.23 « La Cloche » ronronne régulièrement.
~8h-9h : L’avion survole Laroche-Migennes (Yonne), puis continue sa route vers le sud. Les derniers témoins au sol signalent que l’appareil semble fonctionner normalement.
~10h-10h15 : Passage au-dessus de Dijon, puis descente le long de la Vallée de la Saône. Le temps se dégrade légèrement, avec un vent du nord qui commence à se lever.
~10h20-10h30 : L’avion atteint Lyon et s’engage dans la Vallée du Rhône. Le vent du nord se renforce considérablement, perturbant la stabilité de l’appareil.
10h30-10h40 : Catastrophe. Alors que le Caudron C.23 survole la Drôme à environ 1 500 mètres d’altitude, l’un des deux moteurs tombe subitement en panne. L’avion, déséquilibré par la perte de puissance asymétrique et secoué par une violente rafale de vent, devient difficile à contrôler.
2. L’Atterrissage d’Urgence : Tentative Désespérée
Védrines, pilote expérimenté, reconnaît immédiatement la gravité de la situation. Avec un seul moteur et un vent violent, il ne peut pas maintenir l’altitude. Il doit atterrir d’urgence, mais la Vallée du Rhône offre peu d’espaces dégagés.
Il repère un champ près du lieu-dit « La Fouillouse », à proximité du village de Coinaud, sur le territoire de la commune de Saint-Rambert-d’Albon. C’est sa seule chance.
L’approche est périlleuse : Le vent plaque littéralement l’avion vers le sol. Védrines tente de ralentir, de redresser l’appareil, mais le Caudron C.23, lourd de ses 1 600 litres d’essence, devient ingérable.
Le crash : Vers 10h40, l’avion s’écrase violemment au sol. L’impact est d’une brutalité inouïe. Les deux hommes, Jules Védrines (37 ans) et Marcel Guillain, sont tués sur le coup. Leurs corps sont retrouvés dans les débris de l’appareil.
3. L’Émotion Nationale : Des Funérailles Grandioses
La nouvelle se propage rapidement dans tout Saint-Rambert-d’Albon, puis dans la Drôme, puis dans toute la France. Les journaux nationaux titrent en première page : « Jules Védrines est mort ». L’émotion est immense. La France, qui vient tout juste de sortir de la Grande Guerre, perd l’un de ses héros les plus aimés.
Les funérailles à Saint-Rambert-d’Albon
Avant que les corps ne soient transférés à Paris, des funérailles impressionnantes sont organisées à Saint-Rambert-d’Albon. La commune, modeste et rurale, se mobilise pour rendre hommage à l’aviateur. Des milliers de personnes affluent de toute la région : aviateurs, militaires, anciens combattants, simples citoyens venus saluer une dernière fois « Julot ».
Les obsèques nationales à Paris
Quelques jours plus tard, Jules Védrines a droit à des obsèques nationales. Son cercueil est transporté à Pantin (Seine-Saint-Denis), où il est inhumé au cimetière communal.
Le 21 avril, jour de son enterrement, plusieurs avions pilotés par des as de la Grande Guerre survolent le cimetière en hommage à leur camarade disparu. C’est un spectacle à la fois grandiose et poignant : les aviateurs rendent hommage à l’un des leurs de la seule manière qu’ils connaissent, en volant.
Sur la tombe familiale, on peut lire trois épitaphes tragiques :
- Émile Védrines, frère de Jules, tué en aéroplane le 1er avril 1914 à l’âge de 27 ans (Reims)
- Jules Védrines, tué en aéroplane en service commandé le 21 avril 1919 à Saint-Rambert-d’Albon dans son voyage Paris-Rome, 1881-1919
- Fernand Védrines, neveu de Jules, pilote aviateur, tué au Bourget le 18 avril 1928 à l’âge de 29 ans
Trois aviateurs de la même famille, tous morts en avril, tous victimes de l’aviation. Une tragédie familiale qui illustre les dangers de ce métier encore balbutiant.
III. Saint-Rambert-d’Albon : Gardienne de la Mémoire de Védrines
1. La Stèle Commémorative : Un Monument Chargé d’Histoire
Très rapidement après le drame, les autorités locales et nationales décident d’ériger une stèle commémorative sur le lieu exact du crash, au lieu-dit « Fouillouse », près de Coinaud.
L’inscription originale :
« Ici périrent le Lieutenant Aviateur Jules Védrines et son mécanicien Marcel Guillain, le 21 avril 1919, lors du raid Paris-Rome. »
Déplacement de la stèle
Pour faciliter l’accès du public et assurer sa préservation, la stèle est par la suite déplacée devant la mairie de Saint-Rambert-d’Albon, où elle se trouve encore aujourd’hui. Elle est devenue un lieu de recueillement pour les passionnés d’aviation, les historiens, et les descendants des familles Védrines et Guillain.

Une seconde stèle
Une autre stèle commémorative se trouve sur le site de l’aérodrome local, rappelant le lien indéfectible entre Saint-Rambert-d’Albon et l’histoire de l’aviation française.
2. La Rue Jules Védrines : Un Hommage Quotidien
La commune de Saint-Rambert-d’Albon a également nommé une rue Jules Védrines en hommage à l’aviateur. Ce geste symbolique perpétue sa mémoire dans le quotidien des habitants : chaque jour, des Albonnais passent devant cette plaque de rue et se souviennent, même inconsciemment, de cet homme exceptionnel qui a marqué l’histoire de leur commune.
3. Pourquoi Saint-Rambert-d’Albon Est-il Important pour l’Histoire de Védrines ?
Un lieu de mémoire unique
Saint-Rambert-d’Albon n’est pas le lieu de naissance de Védrines (Saint-Denis), ni le lieu de ses plus grands exploits (Paris, Madrid, Chicago), ni même le lieu de son inhumation (Pantin). Pourtant, c’est ici que son destin s’est scellé. C’est ici que sa carrière extraordinaire s’est brutalement interrompue. C’est ici que la France a perdu l’un de ses héros.
Un symbole de la dangerosité de l’aviation pionnière
Le crash de Saint-Rambert-d’Albon illustre parfaitement les risques énormes que prenaient les aviateurs de l’époque. Les avions étaient fragiles, les moteurs peu fiables, les conditions météorologiques imprévisibles. Védrines, qui avait survécu à des centaines de vols, des missions de guerre périlleuses, et même à un grave accident en 1912, a finalement été vaincu par une simple panne moteur et une rafale de vent.
Un témoignage de l’audace d’une époque
Le vol Paris-Rome que tentait Védrines n’était pas un simple exploit sportif. C’était un test grandeur nature pour l’aviation commerciale et postale. Si Védrines avait réussi, il aurait prouvé qu’il était possible d’assurer un service aérien régulier entre capitales européennes. Sa mort a retardé de quelques années le développement de ces liaisons, mais n’a pas tué le rêve.
IV. Le Portrait Humain de Jules Védrines : Qui Était Vraiment « Julot » ?
1. Un Caractère Bien Trempé
Le franc-parler légendaire
Jules Védrines était connu pour son franc-parler de titi parisien. Il ne mâchait pas ses mots, tutoyait ses supérieurs (ce qui choquait l’armée traditionnelle), et n’hésitait pas à critiquer ouvertement les décisions absurdes. Cette attitude lui a valu beaucoup de problèmes avec sa hiérarchie militaire, mais lui a aussi gagné l’affection du public, qui voyait en lui un homme authentique, sans faux-semblants.
L’anecdote du roi d’Espagne
Lorsqu’il atterrit à Madrid en 1911 devant 250 000 spectateurs et le roi Alfonso XIII, Védrines descend de son avion le visage maculé d’huile de moteur, comme n’importe quel mécanicien après un long vol. Alors que le protocole royal aurait exigé une présentation soignée, Védrines serre simplement la main du roi avec un grand sourire et son accent de faubourg. Le roi, charmé par cette authenticité, dira plus tard que Védrines était « l’aviateur le plus sympathique qu’il ait jamais rencontré ».
Un bon vivant
Védrines aimait la vie, les amis, les blagues. Il était réputé pour son sens de l’honneur et de l’amitié. Lorsqu’un camarade aviateur avait besoin d’aide, Védrines était toujours le premier à se porter volontaire. Sa loyauté envers ses amis (Roland Garros, Georges Guynemer) était légendaire.
2. Un Patriote Sincère
L’engagement dans la guerre
Malgré son caractère rebelle, Jules Védrines était un patriote sincère. Lorsque la guerre éclate en 1914, il aurait pu, grâce à sa célébrité, obtenir une affectation confortable à l’arrière. Il choisit au contraire de s’engager au front, acceptant les missions les plus dangereuses.
La campagne « Donner des avions à la France »
Avant la guerre, Védrines est l’un des principaux acteurs de la souscription nationale en faveur de l’aviation militaire. Il milite activement pour que la France se dote d’une force aérienne puissante, pressentant que l’aviation jouera un rôle décisif dans les conflits futurs. Hélas, il a raison : la Première Guerre mondiale voit l’aviation devenir une arme stratégique majeure.
3. Un Mécanicien Avant Tout
La passion de la technique
Ce qui distingue Védrines de beaucoup d’autres aviateurs de son époque, c’est qu’il était d’abord un mécanicien exceptionnel. Il ne se contentait pas de piloter ; il comprenait intimement le fonctionnement de ses avions. Il pouvait diagnostiquer une panne au son du moteur, réparer un problème en plein vol, optimiser les réglages pour gagner quelques kilomètres/heure.
Cette compétence technique explique en partie ses succès en course : là où d’autres pilotes abandonnaient à la première panne, Védrines réparait et continuait.
L’innovation constante
Védrines n’hésitait pas à modifier ses avions pour améliorer leurs performances. Il collaborait étroitement avec les ingénieurs (Morane, Deperdussin, Caudron) pour tester de nouvelles configurations, de nouveaux moteurs. Son esprit d’innovation le plaçait à l’avant-garde de l’aviation.
4. Un Homme de Contradictions
Rebelle mais discipliné
Védrines tutoyait son colonel mais accomplissait scrupuleusement ses missions. Il critiquait l’état-major mais se portait volontaire pour les missions les plus dangereuses. Cette contradiction apparente révèle en fait une personnalité cohérente : Védrines respectait l’efficacité et le courage, mais méprisait la bureaucratie et les privilèges de classe.
Populaire mais discret
Malgré sa célébrité, Védrines n’aimait pas la vie mondaine. Il préférait passer du temps avec sa famille à Bussière-Dunoise ou à Limoux plutôt que dans les salons parisiens. Après la course Paris-Madrid, alors qu’il aurait pu monnayer sa notoriété, il continue simplement à voler, parce que c’est ce qu’il aime.
V. L’Héritage de Jules Védrines : Ce Qu’il Nous Laisse
1. Un Pionnier de l’Aviation Commerciale
Le rêve du vol postal
Le vol Paris-Rome que tentait Védrines n’était pas qu’un exploit sportif. C’était un test pour l’aviation commerciale et postale. Si Védrines avait réussi, il aurait prouvé qu’on pouvait transporter du courrier (et plus tard des passagers) entre capitales européennes en quelques heures au lieu de plusieurs jours par train ou bateau.
Sa mort a retardé mais n’a pas arrêté ce développement. Dès les années 1920, les lignes aériennes postales se multiplient : Lignes Aériennes Latécoère (future Aéropostale), puis Air France (1933). Le rêve de Védrines se réalise, quelques années après sa disparition.
2. Un Modèle d’Ascension Sociale par le Mérite
De l’ouvrier au héros national
L’histoire de Jules Védrines est celle d’une ascension sociale fulgurante : fils d’ouvrier couvreur, lui-même ouvrier et plombier, il devient recordman mondial, millionnaire, et héros national. Cette trajectoire illustre l’esprit de la Belle Époque : une période où le talent, l’audace et le travail pouvaient permettre de franchir les barrières sociales.
L’inspiration pour les générations futures
Combien de jeunes Français, issus de milieux modestes, ont rêvé de devenir aviateurs après avoir lu les exploits de Védrines ? Combien de mécaniciens se sont dit : « Si Julot a pu le faire, pourquoi pas moi ? » L’héritage de Védrines, c’est aussi cette démocratisation du rêve aéronautique.
3. Une Icône Populaire de l’Aviation
Le « titi » qui tutoyait les rois
Védrines reste dans la mémoire collective comme l’aviateur du peuple : franc, direct, courageux, authentique. À une époque où l’aviation était souvent associée à l’aristocratie et à la bourgeoisie (beaucoup de pilotes étaient des jeunes gens fortunés qui pouvaient s’acheter un avion), Védrines représentait l’aviation accessible, celle qui pouvait accueillir des fils d’ouvriers.
4. Saint-Rambert-d’Albon : Gardienne de cette Mémoire
Un devoir de mémoire
En conservant la stèle commémorative, en maintenant la rue Jules Védrines, en accueillant régulièrement des visiteurs passionnés d’aviation, Saint-Rambert-d’Albon remplit un devoir de mémoire essentiel. Notre commune n’est pas seulement le lieu d’un accident tragique ; elle est le dernier témoignage de la vie extraordinaire d’un homme exceptionnel.
Un patrimoine à valoriser
Aujourd’hui, alors que l’aviation est devenue banale (des millions de personnes prennent l’avion chaque jour), il est important de se souvenir de ses pionniers, de ceux qui ont risqué leur vie pour prouver que l’homme pouvait conquérir les airs. Jules Védrines est l’un de ces pionniers, et Saint-Rambert-d’Albon en est le gardien.
FAQ : 10 Questions Fréquentes sur Jules Védrines et Saint-Rambert-d’Albon
1. Qui était Jules Védrines ?
Jules Védrines (1881-1919) était un aviateur français, l’un des plus célèbres pionniers de l’aviation. Ouvrier devenu recordman mondial, il a remporté la course Paris-Madrid (1911), la coupe Gordon-Bennett (1912), et réalisé l’exploit d’atterrir sur le toit des Galeries Lafayette (1919). Héros de la Première Guerre mondiale, il est mort dans un accident d’avion à Saint-Rambert-d’Albon le 21 avril 1919.
2. Pourquoi est-il mort à Saint-Rambert-d’Albon ?
Le 21 avril 1919, Jules Védrines tentait le premier vol postal Paris-Rome à bord d’un Caudron C.23. Vers 10h30, alors qu’il survolait la Drôme, l’un de ses deux moteurs est tombé en panne. Pris dans une violente rafale de vent, il a tenté un atterrissage d’urgence près du lieu-dit « La Fouillouse », à proximité de Coinaud, sur la commune de Saint-Rambert-d’Albon. L’accident fut fatal pour lui et son mécanicien Marcel Guillain.
3. Où se trouvent les stèles commémoratives ?
Il existe deux stèles à Saint-Rambert-d’Albon :
- La principale se trouve devant la mairie (elle a été déplacée depuis le lieu exact du crash pour faciliter l’accès)
- Une seconde se trouve sur le site de l’aérodrome local
Les deux sont accessibles au public et constituent des lieux de recueillement pour les passionnés d’aviation et d’histoire.

4. Pourquoi une rue porte-t-elle son nom à Saint-Rambert-d’Albon ?
Pour honorer la mémoire de Jules Védrines et perpétuer le souvenir de cet aviateur exceptionnel, la commune de Saint-Rambert-d’Albon a nommé une rue Jules Védrines. C’est un hommage quotidien qui rappelle aux habitants et aux visiteurs le lien historique entre la commune et ce héros de l’aviation française.
5. Quel était le but du vol Paris-Rome ?
Le vol Paris-Rome avait pour objectif d’inaugurer la première ligne postale aérienne entre les deux capitales. Il s’agissait de prouver qu’il était possible de transporter du courrier par avion de manière fiable et rapide, ouvrant la voie à l’aviation commerciale moderne. Védrines devait effectuer l’aller-retour en une journée, en survolant le massif du Mont-Blanc, soit environ 2 400 kilomètres.
6. Quels sont ses autres exploits célèbres ?
Les principaux exploits de Jules Védrines sont :
- 26 mai 1911 : Seul vainqueur de la course Paris-Madrid (1 197 km)
- 1912 : Records du monde de vitesse (jusqu’à 170 km/h)
- 9 septembre 1912 : Vainqueur de la coupe Gordon-Bennett à Chicago (169,7 km/h)
- Décembre 1913 : Première liaison aérienne France-Égypte
- 19 janvier 1919 : Atterrissage sur le toit des Galeries Lafayette à Paris
- 1914-1918 : Missions spéciales d’espionnage pendant la Grande Guerre
7. Pourquoi est-il considéré comme un héros ?
Jules Védrines est considéré comme un héros pour plusieurs raisons :
- Son audace : Il a repoussé les limites de l’aviation à une époque où voler était extrêmement dangereux
- Son patriotisme : Il s’est engagé volontairement dans les missions les plus périlleuses pendant la Première Guerre mondiale
- Son authenticité : Issu d’un milieu ouvrier, il a conservé son franc-parler et est resté proche du peuple
- Son innovation : Il a contribué au développement technique de l’aviation
- Son sens de l’amitié : Il a formé de nombreux pilotes, dont Georges Guynemer, futur as de la guerre
8. Peut-on visiter les lieux liés à Jules Védrines à Saint-Rambert-d’Albon ?
Oui, absolument ! Les deux stèles commémoratives et la rue Jules Védrines sont accessibles au public toute l’année. La stèle devant la mairie est particulièrement facile d’accès.
9. Quel était son surnom et pourquoi ?
Jules Védrines était surnommé « Julot », un diminutif affectueux typique du parler populaire parisien. Ce surnom reflétait ses origines modestes (il était fils d’ouvrier) et son caractère franc et direct. Contrairement à d’autres aviateurs de son époque qui cultivaient une image aristocratique, Védrines restait fier de ses racines populaires et de son accent de « titi parisien ».
10. Où est-il enterré ?
Jules Védrines est enterré au cimetière de Pantin (Seine-Saint-Denis), dans une tombe familiale tragique qui réunit trois aviateurs morts en avril :
- Émile Védrines (frère), tué en avion le 1er avril 1914 à Reims
- Jules Védrines, tué le 21 avril 1919 à Saint-Rambert-d’Albon
- Fernand Védrines (neveu), tué le 18 avril 1928 au Bourget
Ses obsèques nationales, le 21 avril 1919, ont été marquées par le survol du cimetière par plusieurs avions pilotés par des as de la Grande Guerre rendant hommage à leur camarade.
Glossaire : Comprendre le Vocabulaire de l’Aviation Pionnière
Aérodrome : Terrain aménagé pour le décollage et l’atterrissage des avions. Au début du XXe siècle, les aérodromes étaient souvent de simples champs d’herbe.
Aéroplane : Terme ancien pour désigner un avion. Utilisé couramment jusqu’aux années 1930-1940.
Biplan / Monoplan : Un biplan possède deux ailes superposées (comme le Caudron G.4), un monoplan n’en possède qu’une seule (comme le Deperdussin de Védrines).
Brevet de pilote : Certification officielle autorisant à piloter un avion, délivrée par l’Aéro-Club de France. Védrines a obtenu le n°312 le 7 décembre 1910.
Caudron C.23 : Avion bimoteur de bombardement français construit par la société Caudron. C’est à bord de ce type d’appareil que Védrines s’est écrasé à Saint-Rambert-d’Albon le 21 avril 1919.
Coupe Gordon-Bennett : Compétition aéronautique internationale de vitesse organisée entre 1909 et 1913. Védrines l’a remportée en 1912 à Chicago.
Escadrille des Cigognes : Unité d’aviation militaire française célèbre pendant la Première Guerre mondiale, dont faisait partie Jules Védrines. C’est là qu’il a formé Georges Guynemer.
Fuselage monocoque : Innovation technique majeure du début du XXe siècle. Le fuselage monocoque est une structure d’une seule pièce (sans cadre interne), plus légère et plus solide. Inventé par Louis Béchereau pour les avions Deperdussin que pilotait Védrines.
Galeries Lafayette (exploit des) : Le 19 janvier 1919, Jules Védrines réussit à atterrir sur le toit du grand magasin parisien, exploit jugé impossible. Il empoche 25 000 francs mais casse son train d’atterrissage et ne peut pas redécoller.
Gnome (moteurs) : Société française fabricante de moteurs rotatifs pour avions, où Védrines a travaillé comme mécanicien de 1905 à 1910. Ces moteurs équipaient la plupart des avions de l’époque.
Ligne postale aérienne : Service de transport de courrier par avion entre deux villes. Le vol Paris-Rome que tentait Védrines devait inaugurer la première ligne postale aérienne entre les deux capitales.
Mécanicien d’essais : Technicien chargé de tester les moteurs d’avion après leur fabrication. C’était le poste le plus élevé accessible aux ouvriers chez Gnome, que Védrines occupait avant de devenir pilote.
Missions spéciales : Pendant la Première Guerre mondiale, missions secrètes consistant à déposer et récupérer des espions derrière les lignes ennemies. Védrines en a réalisé au moins une dizaine entre 1916 et 1918.
Morane-Saulnier / Deperdussin : Constructeurs aéronautiques français pour lesquels Védrines a volé. Morane lui a permis de gagner Paris-Madrid (1911), Deperdussin de battre le record de vitesse mondiale (1912).
Panne moteur : Arrêt soudain du fonctionnement d’un moteur d’avion. C’est une panne moteur qui a causé le crash de Védrines à Saint-Rambert-d’Albon. Sur un avion bimoteur, la perte d’un moteur crée un déséquilibre difficile à contrôler.
Record de vitesse : Performance homologuée officiellement comme la plus rapide jamais réalisée. En 1912, Védrines a établi plusieurs records mondiaux de vitesse, culminant à 169,7 km/h (coupe Gordon-Bennett).
Stèle commémorative : Monument en pierre érigé pour commémorer un événement ou honorer une personne. Deux stèles à Saint-Rambert-d’Albon rappellent le crash de Jules Védrines et Marcel Guillain.
Titi parisien : Expression désignant un Parisien populaire, au caractère franc et gouailleur, souvent issu des faubourgs ouvriers. Védrines incarnait parfaitement ce type, avec son accent de Saint-Denis et son franc-parler.
Villacoublay (aérodrome de) : Base aérienne historique située dans les Yvelines (aujourd’hui intégrée à la base aérienne 107 Villacoublay). C’est de là que Védrines a décollé pour son dernier vol le 21 avril 1919.
Liens Utiles : Pour Aller Plus Loin
Sur Jules Védrines
Aérostèles – Stèle Jules Védrines
https://www.aerosteles.net/stelefr-pantin-vedrines
Site spécialisé dans les monuments commémoratifs aéronautiques. Page dédiée à la tombe de Jules Védrines au cimetière de Pantin.
Air Journal – Le crash du 21 avril 1919
https://www.air-journal.fr/2021-04-21-le-21-avril-1919-dans-le-ciel-mort-brutale-de-vedrines-et-de-son-mecanicien-5227410.html
Article détaillé sur les circonstances du crash de Saint-Rambert-d’Albon.
Encyclopédie Universalis – Biographie de Jules Védrines
https://www.universalis.fr/encyclopedie/jules-vedrines/
Biographie académique complète et fiable.
Avions Légendaires – Portrait de Jules Védrines
https://www.avionslegendaires.net/biographie/jules-vedrines/
Biographie détaillée avec focus sur ses exploits aéronautiques.
Wikipedia – Jules Védrines
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jules_Védrines
Article encyclopédique avec sources vérifiées.
Sur Saint-Rambert-d’Albon
Office de Tourisme Porte de DrômArdèche
http://www.autour-du-palais-ideal.fr
Informations pratiques pour visiter Saint-Rambert-d’Albon et découvrir son patrimoine.
La Drôme Tourisme
http://www.ladrometourisme.com
Site officiel du tourisme dans la Drôme, incluant des circuits patrimoniaux.
SaintRambertdAlbon.com
www.saintrambertdalbon.com
Site de référence sur le patrimoine local, l’histoire et la vie de la commune (vous y êtes !).
Livres recommandés
Thierry Matra, Jules Védrines : 250 000 km en aéroplane, Les Établissements, 2020
Ouvrage de référence le plus complet sur la vie de Védrines, fruit d’un important travail de recherche.
Jacques Mortane, Védrines, Baudinière, 1931
Biographie écrite par un journaliste ami de Védrines, témoignage direct de l’époque.
Pierre Vallaud, 14-18, La Première Guerre mondiale, Fayard, 2004
Contexte historique pour comprendre le rôle de Védrines pendant la Grande Guerre.
Bernard Mark, Histoire de l’aviation, Flammarion, 2001
Pour replacer les exploits de Védrines dans l’histoire générale de l’aviation.
Archives et musées
Musée de l’Air et de l’Espace (Le Bourget)
3 Esplanade de l’Air et de l’Espace, 93350 Le Bourget
http://www.museeairespace.fr
Le plus grand musée aéronautique d’Europe, avec une section dédiée aux pionniers.
Archives départementales de la Drôme
3 rue de Madier de Montjau, 26000 Valence
archives.ladrome.fr
Documents historiques sur le crash de Saint-Rambert-d’Albon.
Conclusion : Jules Védrines, un Héros Toujours Vivant à Saint-Rambert-d’Albon
Plus de cent ans après sa disparition tragique, Jules Védrines continue de fasciner et d’inspirer. Son histoire est celle d’un self-made-man à la française : un fils d’ouvrier devenu héros national, un mécanicien autodidacte devenu recordman mondial, un « titi » parisien au franc-parler devenu l’égal des rois.
À Saint-Rambert-d’Albon, nous avons la responsabilité et l’honneur d’être les gardiens de sa mémoire. La stèle devant notre mairie, la rue qui porte son nom, ne sont pas de simples plaques commémoratives. Ce sont des témoignages vivants d’une époque héroïque, d’un temps où l’aviation n’était pas encore banale, où chaque vol était un défi lancé à la gravité et à la mort.
Quand vous passez devant la stèle, prenez un instant pour vous souvenir. Ce monument rappelle qu’en ce matin d’avril 1919, un homme et son mécanicien ont sacrifié leur vie pour faire progresser l’aviation. Leur courage et leur détermination ont ouvert la voie à l’aviation commerciale moderne, celle qui nous permet aujourd’hui de traverser le monde en quelques heures.
Jules Védrines n’est pas mort pour rien. Son rêve d’une aviation postale et commerciale s’est réalisé. Chaque fois qu’un avion décolle d’un aéroport français, c’est un peu grâce à lui, grâce à tous ces pionniers qui ont osé défier le ciel.
À Saint-Rambert-d’Albon, nous ne l’oublions pas. Et nous invitons tous les passionnés d’aviation et d’histoire à venir se recueillir sur les lieux où ce grand homme a vécu ses derniers instants.
Julot, le titi de Saint-Denis, repose en paix à Pantin. Mais son âme continue de planer au-dessus de Saint-Rambert-d’Albon.
Article rédigé par Jean-Baptiste Mesona
Consultant culturel & Rédacteur spécialisé en Histoire & Patrimoine
Contact :
🌐 saintrambertdalbon.com
🌐 jeanbaptistemesona.fr
Sources vérifiées :
- Aérostèles – Monuments commémoratifs aéronautiques
- Air Journal – Histoire de l’aviation
- Encyclopédie Universalis – Biographie Jules Védrines
- Avions Légendaires – Archives aéronautiques
- Wikipedia – Jules Védrines (sources multiples)
- Archives départementales de la Drôme
- Et si Nexon m’était conté – Jules Védrines
- Office de Tourisme Porte de DrômArdèche
- Thierry Matra, Jules Védrines : 250 000 km en aéroplane, Les Établissements, 2020
En savoir plus sur Saint-Rambert-d'Albon
Abonnez-vous pour recevoir les derniers articles par e-mail.

[…] Jules Védrines : Le « Titi » Parisien Devenu Légende de l’Aviation – Un Destin Tragiquemen… […]
J’aimeJ’aime